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Manuel de Falla (1876 - 1946)

 

Quand on évoque le nom de Manuel de Falla, on ne tient pas réellement compte de sa place dans l’histoire de la musique. Il est pourtant le plus grand compositeur espagnol du XX° siècle, et de loin depuis Morales ou Victoria. Il a su tiré ses influences nationales d’Albéniz et Granados et donner à sa musique le modernisme d’un Debussy, Ravel et Stravinsky.

Dans les dernières années de sa vie,il délaisse le style impressionniste français pour donner naissance à un langage purement ibérique néoclassique.

 

L’Espagne :

Manuel de Falla a vu le jour à Cadix le 23 novembre 1876 ; son père est un honnête commerçant originaire de Valence tandis que sa mère est une vraie catalane. Rien ne laissait présager chez le jeune garçon un destin de musiciens ou de quelconques dispositions musicales, bien que la famille Falla fût très amatrice de musique.

Vers l’âge de huit ans néanmoins, sa mère lui décèle de petites affinités avec la musique et, en bonne pianiste amateur, lui procure quelques rudiments pianistiques. Plusieurs professeurs, aux capacités limitées – il faut bien l’avouer – se succédèrent pour lui inculquer les éléments de base de la musique et de la composition, jusqu’au jour où les Falla font la connaissance de M. Viniegra, un commerçant violoncelliste à ses heures qui encourage le jeune musicien à composer. Ces partitions de jeunesse sont aujourd’hui perdues. Son premier vrai professeur s’appelle José Trago, également l’un des meilleurs pianistes espagnols de l’époque.

Falla a vingt ans et jusqu’en 1898 il suivra avec son maître les cours du Conservatoire Royal. Trago possédait un lourd héritage qui ne fut pas sans influences sur Falla : il avait hérité sa technique de Georges Mathias, lui-même élève de Chopin. Falla obtint un premier prix et un concert au Conservatoire.

Il a vingt ans, il improvise et compose ; de petites pièces pour piano pour se faire la main : Valse, Caprice, Nocturne, Sérénade andalouse.

Parmi les premiers éléments qui se dégagent de son esthétique musicale, on peut relever la gamme andalouse, les pédales permanentes, les interruptions dans l’enchaînement des accords, les modulations par enharmonies – une des caractéristiques de la musique populaire andalouse.

Ainsi, dès ses premières œuvres se dégage cette double influence de la musique « savante » et de la musique populaire ; Falla ne veut pas du tout devenir un musicien espagnol et il a su à juste titre dépasser les éléments nationaux pour les transcender.

1900 : Falla s’installe à Madrid et un profite pour être en relation avec plusieurs musiciens. Il se distingue alors comme compositeur de zarzuelas, ce qui lui permet, en 1901, de rencontrer Felipe Pedrell. Il deviendra son élève pendant trois ans et approfondira sérieusement ses connaissances auprès de lui. Mais il n’écrira rien, ne compose pas une ligne. Agé de vingt-cinq ans, il a l’impression de n’avoir fait aucun progrès. Ses études se terminent en 1904 lorsque Pedrell quitte Madrid. Il lui faut désormais composer : ce sera la Vie brève, son premier opéra, écrit en huit mois.

 

Paris :

La vie musicale en Espagne est telle que le système musical s’en trouve clos, limité à son univers populaire, refusant les apports de la Jeune France. Falla ne veut alors qu’une chose : quitter cette Espagne vieillissante pour la France et apprendre la musique moderne des Ravel, Debussy, Roussel et Dukas. Son rêve va devenir réalité, mais pas grâce à l’opportunité qui va se présenter.

Le 5 juillet 1904, l’Académie Royale des Beaux-Arts de San Fernando met au concours la réalisation d’un opéra espagnol en un acte ; le vainqueur pourra réaliser un voyage. C’est ce qui décide Falla à se présenter. Il propose la Vie brève, et le 14 novembre 1905, l’Académie lui donne le prix. Toutefois, pour faire représenter son œuvre, Falla doit faire face à maintes contraintes et sans représentation, tout voyage est impossible à entreprendre.

Falla va démarcher pendant un an et demi pour voir son œuvre sur scène. Echecs et contretemps pendant tout ce temps. La vie en Espagne lui est insupportable. Avec le peu d’argent qu’il lui reste, il part pour Paris en juillet 1907 et espère trouver une intense activité musicale.

A peine arrivé, il va à la rencontre de Dukas et Debussy. Durant sept années où il vivra à Paris, il va acquérir la technique de l’orchestre, étudie les œuvres françaises contemporaines et réussit même à faire jouer ses premières œuvres importantes. Il fait également la connaissance de Ricardo Vines – le célèbre pianiste, qui lui fait rencontrer celui qui deviendra un ami très cher, Maurice Ravel – et d’Albéniz.

Falla compose : il reprend les Quatre pièces espagnoles, ébauchées à Madrid, qu’il réussit à faire publier grâce à Dukas, Ravel et Debussy. En novembre 1908, Ricardo Vines donnera ces Pièces en concert à la Société Nationale de Musique. Le style d’écriture évolue et commence à faire entendre des influences impressionnistes caractéristiques de Debussy et Ravel. Esthétiquement, il ouvre une nouvelle voie en prenant des airs populaires pour les modifier comme il veut et en imposer ses idées et sa forme.

En réaction à la Société Nationale de Musique devenant de plus en plus inaccessible, Fauré décide de créer la Société Musicale Indépendante, dont Falla sera un fidèle représentant. En 1912, la santé de Manuel n’est pas très bonne et tombe gravement malade ; il doit être hospitalisé pendant plusieurs mois. Toutefois, après s’être remis sur pieds, il réussit à faire représenter une Vie brève par un enchaînement de circonstances pour le moins miraculeux.

 

L’Espagne :

Manuel de Falla est de retour à Madrid. Pendant cinq années, il va travailler dur. Pour la première fois, la Vie brève est représentée, au théâtre de la Zarzuela le 14 novembre 1914. En décembre de la même année, il compose la Prière des mères qui ont leurs enfants dans les bras. Quelques jours avant de mettre fin à sa chanson, il rencontre une vraie gitane, pure souche, qui lui conte pléthores histoires de sorcières et de revenants. Cela le motive et il cherche à tirer profit de cette rencontre hasardeuse. Naît ainsi l’argument de l’Amour Sorcier.

Falla est revenu de France avec une féroce rage de composer ; il a alors quarante ans et a désormais trouvé son propre langage, fruit de ces années de recherches. Il donne ainsi beaucoup de concerts et ouvre à l’Espagne la culture des Bartók, Ravel, Satie ou Hindemith.

En mai 1915, il s’établit à Barcelone pendant deux mois où il peut achever les Nuits dans les jardins d’Espagne. Mais à force de travail, il tombe à nouveau malade de fatigue et doit se reposer dans une maison de santé à Cordoue. Il ne sortira du silence qu’après plusieurs mois.

1916 est donc l’année de son retour, avec la version définitive de l’Amour Sorcier et la création des Nuits le 9 avril. Jusqu’en 1919, Falla reste très occupé, composant le Magistrat et la meunière (1917) et Feu follet (1918), sur des thèmes de Chopin. C’est à cette période que Falla perd le contact avec la mode impressionniste pour mieux s’ouvrir aux techniques musicales d’Albéniz et développer un univers néo-classique.

Les années qui suivent, Falla travaille encore et toujours, multipliant les voyages à l’étranger. Ce sont des années de sagesse, d’intenses réflexions. Parmi les œuvres qui voient le jour à cette époque, Psyché (pour chant et orchestre de chambre, 1924/1925), un Concerto pour clavecin et orchestre (à la demande de Wanda Landowska) et le Retable de maître Pierre (une commande de la princesse Polignac). Œuvres dans lesquelles il assimile parfaitement les techniques de musique ancienne et les techniques de Stravinsky.

Novembre 1917 est important dans l’œuvre et la vie de l’espagnol car il s’atèle à une nouvelle œuvre, qu’il avait commencé à ébaucher quelques mois plus tôt. Il s’agit de l’Atlantide. C’est l’œuvre de sa vie, à laquelle il va se consacrer jusqu’à la fin de ses jours mais qui demeurera néanmoins inachevée.

« C’est l’œuvre dans laquelle j’ai mis le plus d’enthousiasme. Puissé-je avoir vie et santé, au moins pour la terminer. Ce sera une œuvre assez complexe, qui emplira tout le programme d’un concert. Il y aura des solistes vocaux qui représenteront le texte dramatique du poème, des chœurs et une partie orchestrale ».

Toutefois, sur les vingt années à peine qu’il lui reste à vivre, Falla va écrire d’autres pièces (notamment une suite qu’il appellera Hommages) et est congratulé de toutes parts : il reçoit les honneurs de la France qui lui décerne la Légion d’Honneur (1928) et le gouvernement espagnol le nomme président de l’Institut d’Espagne.

En février 1939, il tombe à nouveau malade et toute activité lui est interdite pendant plusieurs mois.

 

Argentine :

Falla est âgé et désormais l’idée de la mort lui est que trop familière. Un matin de 1946, Falla ne répond pas. Le 14 novembre 1946, il meurt d’une crise cardiaque. Cinq jours plus tard, le 19 novembre, ses funérailles sont célébrées dans la cathédrale de Cordoba après avoir exposé le corps au public pendant plusieurs jours. La messe est célébrée comme une fête, avec des lustres, des tapis, des fleurs et de l’encens, puis le défunt est promené dans les rues.

La dépouille du compositeur est ensuite transportée sur un navire de guerre espagnol qui le débarque à Cadix. Et là, la « fête » reprend de plus belle.

Le 9 janvier 1947, Falla est enterré dans la crypte de la cathédrale, avec l’inscription réalisée selon ses dernières volontés : « L’honneur et la gloire ne sont que de Dieu ».

                                                                                                                                                                                                              

 

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