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                                                            Elliott Carter ( 1908 - /)

 

Elliott Carter est l’un des compositeurs majeurs et le plus allègre de notre temps. Auteur d’une œuvre musicale considérable, composant dans presque tous les genres musicaux, il a su s’entourer des musiciens les plus influents : Charles Ives, Nadia Boulanger, Edgar Varèse, Aaron Copland, Igor Stravinsky ou Darius Milhaud. Interprété dans le monde entier par des artistes de grande notoriété et par les plus prestigieux orchestres (Boulez, Barenboïm, Levine…), Elliott Carter nous livre sa créativité sans cesse renouvelée liant musique et dramaturgie instrumentale, explorant ainsi les diverses relations possibles entre individualités et groupes à travers des scénarios, permettant une approche formelle nouvelle.

 

 

L’homme et sa musique :

    

Elliott Carter est né le 11 décembre 1908 à New York, au sein d’une famille bourgeoise qui n’avait pas de goût particulier pour les arts. S’il prend des leçons de piano àl’âge de dix ans, c’est sans bien grand intérêt et même avec indifférence qu’il interprète le répertoire classique et romantique. Il préfère alors s’immerger dans le bouillonnement culturel de Greenwich Village, à travers d’autres formes de culture.

A partir de 1920, il étudie à la Horace Mann High School de New York. En 1924, il fait une rencontre fondamentale en la personne de Charles Ives, qui devient un guide, un ami et le conduit doucement dans sa carrière de compositeur, en lui faisant découvrir l’avant-garde musicale à travers les œuvres de Bartók, Varèse, Schoenberg et ses disciples, Stravinsky. C’est notamment à l’audition du Sacre du printemps que Carter décide de devenir compositeur ; profession qu’il n’avait guère ambitionnée auparavant.

En approfondissant sa culture musicale, Carter rejette peu à peu le conservatisme musical pour s’intéresser davantage à la littérature, la philosophie ou les mathématiques. Parallèlement, il suit une formation musicale à la Longy School of Music où il apprend le hautbois, chante dans un chœur et se produit en tant que pianiste. En 1930, il obtient le diplôme de Bachelor of Arts puis le Master of Arts (1932), à l’Université de Haward. Parmi ses professeurs, Walter Piston (harmonie, contrepoint) et Gustav Holst (composition).

Afin de parfaire sa formation musicale, il part pendant trois ans à Paris, suivre l’enseignement de Nadia Boulanger, à l’Ecole Normale. Grâce à elle, il va approfondir ses connaissances en musique ancienne et développer une science dans le contrepoint qu’il ne maîtrisait pas alors.

 

A son retour à New York en 1936, il est engagé comme directeur musical du Ballet Caravan (1936-1940). Dès l’année suivante, il publie plusieurs critiques musicales, dans la revue Modern Music, ainsi que des essais sur des compositeurs ou sur sa propre musique.

A partir de 1939, Carter développe une passion dans l’enseignement : d’abord au St-John’s College d’Annapolis (1939-1941) en enseignant la musique, les mathématiques et le grec ancien, puis la composition au Peabody Conservatory de Baltimore (1946-1948). Entre temps il devient membre de la League of Composers (jusqu’en 1952), de l’American Composers Alliance (jusqu’en 1950), consultant à l’Office of War information (1943-1945), intègre la Société Internationale de Musique Contemporaine (il prendra la présidence de la section américaine de 1952), tout en poursuivant ses recherches musicales.

 

L’année 1950 va marquer un tournant décisif dans sa vie, avec la composition de son Premier Quatuor. Il va remporter avec cette œuvre le Premier Prix du concours de composition de Liège (1953) accédant alors à une renommée internationale qui ne va cesser de s’accroître. Sa vie va ainsi s’équilibrer entre composition, et enseignement (Queens College de New York, 1955-1956 ; Yale University, 1960-1962 ; Juilliard School of Music, 1964 ; Cornell University, 1967-1968) et production d’articles critiques et théoriques.

A partir des années 1980, Carter va essentiellement se consacrer à la composition reléguant ses autres taches au second plan. Sa carrière est notamment récompensée par de nombreuses distinctions : le Prix Pulitzer (1960-1973) pour son Second et Troisième Quatuor, la Médaille d’or du National Institute of Arts ans Letters pour la musique (1971), le Ernst Von Siemens Music Prize (Allemagne), nommé « Commandeur dans l’Ordre des Arts et les Lettres » (France, 1988) et reçoit le Prix Prince Pierre de Monaco (1998).

 

L’homme et ses œuvres :

    

Elliott Carter a su réaliser une synthèse entre les diverses tendances de la musique du XX° siècle et des conceptions musicales appartenant à des époques ou à descultures très différentes. En écrivant une musique exigeante, loin du style américanisant de Bernstein ou Copland et du sérialisme, il a construit une œuvre dans un grand esprit d’indépendance, dans laquelle on peut déceler plusieurs périodes.

Carter compose ses premières partitions après son séjour en France (1932-1935), essentiellement de la musique vocale et de la musique de scène. Sa première écriture ne laisse rien paraître de l’anticonformisme qu’il a adopté depuis son adolescence et reste attachée à la tonalité, au contrepoint des madrigalistes de la Renaissance et de Jean-Sébastien Bach. Ses musiques témoignent de son goût pour le néoclassicisme (The Minotaur, 1947) et le populisme (Pocahontas, 1939).

Sa production chorale, qui constitue une grande partie de son œuvre à cette époque, s’inspire de Stravinsky et Milhaud (The Defense of Corinth, 1941) et tend déjà vers une écriture polyrythmique (Musicians Wrestle Everywhere, 1945). Il laisse aussi deux œuvres pour orchestre, une première symphonie (Symphony n°1) qui prend des influences de Harris, Copland ou compositeurs américains divers, et Holiday Ouverture (1944).

 

Il faut attendre la fin de la seconde Guerre Mondiale pour que Carter se libère de ces modèles et formes traditionnels. Même si certaines œuvres tirent encore leur source du coté de Nadia Boulanger (Quintette pour vents, 1948), Hindemith, Copland ou Stravinsky (Sonate pour piano, 1945), l’écriture tend vers une caractéristique plus marquée des instrumentistes, surtout au niveau acoustique et organique (Sonate pour violoncelle et piano, 1948).

C’est avec le Premier Quatuor à cordes (1950-1951) que Carter affirme son propre langage. Il a mené avec une longue maturation une profonde réflexion sur le temps musical, dans le domaine musical (Ives, Première Sonate pour violon et piano) et littéraire (Joyce, Proust, Kafka, Thomas Mann), en s’appuyant sur les travaux de Varèse ou Ruggles. C’est aussi la première fois qu’il fait usage de « la modulation métrique », en particulier dans le dernier mouvement ; et que dans ce temps comprimé et dilaté les instruments évoluent dans des strates temporelles indépendantes et en perpétuelle évolution. Cette œuvre ne fait que confirmer l’orientation nouvelle de Carter dans les œuvres de la décennie suivante.

Avec le Second Quatuor (1959), la dramaturgie instrumentale est tellement développée que les musiciens deviennent des « personnages / instruments ». Chacun d’eux possède ainsi une identité propre caractérisée par des intervalles, un rythme, une expression ou même un mode de jeu spécifique.

Cette dramaturgie, Carter ne va cesser de l’explorer, renouvelant sans cesse l’approche formelle, et explorant davantage toutes les combinaisons instrumentales : le Troisième Quatuor à cordes (1971), A Symphony of Three Orchestras (1976), Quintette pour cuivres (1974), Triple Duo (1982), Penthode (1985).

En misant sur une indépendance des instruments, la dramaturgie instrumentale avait atteint des extrêmes avec Duo (1973-1974) ou le violon et le piano semblaient être enfermés chacun dans leur univers imperméable. Avec le Quatrième Quatuor à cordes (1985), Carter tente de réconcilier les instrumentistes en multipliant les échanges et les dialogues.

 

En dehors de la dramaturgie musicale, Carter s’attache aussi à repenser le langage harmonique. S’il utilisait souvent le tétracorde, il use par la suite de hauteurs plus larges et recourt en même temps à diverses structures rythmiques. Dans les années soixante à quatre-vingts, l’emploi de polyrythmes géants devenaient de plus en plus fréquents. Toutes ces innovations aboutirent, à partir de 1990, à une simplification du langage, offrant à ses œuvres un vocabulaire mélodico-harmonique provenant surtout de l’hexacorde contenant l’ensemble des tricordes.

La production musicale de Carter est vaste et variée, comprenant tous les genres et toutes les formes. Le concerto est notamment son genre de prédilection et permet à Carter de poursuivre ses études sur la dramaturgie instrumentale, à travers le Double Concerto (1961), le Concerto pour piano (1964-1965), le Concerto pour hautbois (1986-1987), le Concerto pour clarinette (1996), le Concerto pour violon (1990), le Concerto pour violoncelle (2000), Dialogues (2003) pour piano et orchestre, ou le Concerto pour cor (2006). Il essaiera même de redonner une nouvelle vie au concerto grosso avec Asko Concerto (1999-2000), le Boston Concerto (2002) ou le Concerto pour orchestre qui fut la première expérience du genre en 1969.

Vers les années 1970, Carter s’épanche de nouveau pour la voix. Dès lors, il met à l’honneur divers auteurs, tels Elizabeth Bishop (A Mirror on Which to Dwell, 1975), John Ashbery et des poètes grecs anciens (Syringa, 1978), Robert Lowell (In Sleep, in Thunder, 1981)…

Surtout, en 1997, il compose un opéra What Next ? sur un livret de Paul Griffiths où il pose le problème de la communication entre les individus et le transpose dans le domaine instrumental.

 

La créativité de Carter n’a jamais cessé de s’installer, multipliant les œuvres pour soliste, orchestre ou diverses formations : Reflexions (2004), Three Illusions (2004), Soundings (2005), Sound Fields (2007), Interventions (2007), Quintette avec clarinette (2007).

Parmi ses dernières créations : Wind Rose pour ensemble à vents (2008), un Concerto pour flûte (2008), What Are Years pour soprano et ensemble (2009), Nine by Five deuxième quintette à vents (2009) et A Sunbeam's Architecture Songs pour ténor et orchestre de chambre (2010)

                                                                                                                                                                                             

  
 

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